Gaz de schiste : la fin des mensonges ?

La loi du 13 juillet 2011, en interdisant la fracturation hydraulique, voulait mettre un terme, en France, à l’exploration et à l’exploitation du gaz dit de schiste, appelé aussi non conventionnel, c’est-à-dire contenu dans le sous-sol dans des réservoirs exigus. Ce texte, exhibé comme une grande victoire de l’écologie politique, voulait être le premier d’une longue série conduisant à la disparition progressive de l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures, à la frugalité, la sobriété, en fait à la décroissance accélérée de nos économies.

En fait l’écologie allemande avait choisi la lutte contre le nucléaire en acceptant une augmentation de l’utilisation du charbon, de la lignite …et du gaz avec la construction de gazoducs Russie Allemagne par la mer Baltique permettant ainsi d’ignorer les pays adjacents, en particulier Ukraine ou Pologne. La politique énergétique allemande était donc « gazière », contrairement à la politique française restant accrochée au nucléaire et au mix énergétique. D’un côté la dépendance énergétique accrue (surtout avec la Russie) et de l’autre, une tradition ancestrale réanimée par le Général de Gaulle et Pompidou d’indépendance.

Le monde étant dépendant pour 80% des hydrocarbures pour sa satisfaction énergétique, il est clair que les tenants de la disparition de l’utilisation des fossiles, les partisans de la pureté de la verdeur, mentaient effrontément mais certaines populations, souvent favorisées et urbaines se satisfaisaient de cet avenir riant où le vent et le soleil venaient les réveiller avec leur café chaud et leur pain grillé. La voie choisie d’éradiquer les énergies fossiles s’accompagnait donc de la construction de gazoducs, de centrales à charbon et à gaz et même à l’achat de charbon russe tandis que l’on mettait au rencart nos installations de raffinage pour « faire propre » ! C’est ainsi que, par exemple, nous sommes tous devenus dépendants en Europe, pour le gazole, des raffineries russes respectant peu les standards environnementaux !

L’hypocrisie du système est apparue lorsque nous avons dû, avec la guerre en Ukraine, regarder la réalité en face : seuls les pays à installations nucléaires étaient protégés de la dépendance structurelle à la Russie, nos économies étaient exigeantes en gaz, nous avions refusé d’exploiter celui que nous avions en sous-sol et nous avons demandé que l’on nous livre à prix d’or le gaz de schiste américain ! Nous avons donc mené une politique énergétique de gribouille et ceux qui l’ont préconisée ont commis des erreurs dont on aimerait qu’elles soient involontaires sans en être bien surs !  Difficile d’admettre aujourd’hui s’être trompés autant, difficile de justifier la loi « presque unanime » du 13 Juillet 2011 interdisant la fracturation hydraulique et donc l’exploration et l’exploitation de notre sous-sol des gaz non conventionnels qu’il contient, difficile de se rappeler la fermeture de Fessenheim et l’arrêt des programmes SuperPhénix et Astrid, difficile de faire oublier les votes de 2017 non encore définitifs d’arrêt immédiat de l’exploration et de l’exploitation d’hydrocarbures en France (métropole et Dom-Tom)…et d’ailleurs les éléments de langage de la plus grande partie des programmes politiques reprennent les anciennes lunes castratrices célébrant la beauté des énergies renouvelables et la nécessité d’y recourir aveuglément. Bien sûr,  on aimerait bien que le vent et le soleil nous apportent gratuitement une énergie abondante, que tous nos déchets soient recyclés sans dépenses, que nos villes soient vertes, que nos matières premières soient toutes d’origine végétale, que tout autour de nous soit propre et durable…Mais ce n’est pas encore le cas , c’est même l’inverse car les nouvelles technologies dont nous nous servons tous les jours et qui nous donnent ce sentiment de « verdeur » sont assises sur des matériaux de plus en plus difficiles et chers à acquérir.

Le covid d’abord, la guerre en Ukraine ensuite, nous ont ouvert les yeux mais nous avons envie de les refermer et de repartir dans nos rêves comme ceux de la publicité pour la voiture électrique avec le silence des enfants endormis à l’arrière passant sur une route sans bruit devant un champ d’éoliennes ! Le vent et le soleil sont intermittents, ils ne produisent donc pas une énergie abondante et bon marché, ils ont besoin du gaz pour assurer la continuité de la consommation d’électricité. Le nucléaire est une source d’énergie sans émissions de gaz à effet de serre et donc indispensable à notre futur. Notre sol doit être utilisé en priorité pour nourrir les humains et non pour faire une énergie chère. L’énergie électrique ce sont des électrons en mouvement, donc non stockables, quand on parle de stockage de l’énergie électrique c’est un abus de langage, on transforme l’électricité produite et on retransforme derrière pour l’utiliser, il y a donc deux pertes de rendement ! L’avenir ce n’est pas l’éradication de telle ou telle source d’énergie, mais la lutte contre les gaspillages et la recherche de rendements meilleurs. Chaque pays doit donc rechercher son meilleur mix énergétique, une énergie abondante et bon marché permettant l’existence d’une industrie et satisfaisant des consommateurs désireux d’une stabilité des réseaux, une disponibilité selon leurs désirs et leurs nécessités .

Il faut donc, au moins en France en laissant nos voisins allemands dans leurs illusions, arrêter de mentir, de nous mentir, en servant en boucle au peuple l’arrivée d’énergies renouvelables satisfaisant rapidement l’ensemble de nos besoins. Il faut y travailler, c’est clair, éviter les gaspillages, recycler, mais arrêter aussi de croire au Père Noel ! il va falloir surtout investir dans le nucléaire, celui d’aujourd’hui, de demain et d’après demain, redéfinir la place des énergies fossiles et envisager d’explorer et d’exploiter notre sous-sol, accepter l’idée que nous ne sommes pas là pour dicter au monde entier ce qui est le « bien », mais pour faire vivre 65 millions de personnes aspirant à maintenir , au moins, le niveau de vie actuel. Le principe qui a maintenu la prospérité de notre pays  est celui d’une certaine indépendance basée sur une énergie abondante et bon marché, ce principe doit être maintenu si l’on veut survivre , il conduit à tout explorer, la méthanisation des ordures, comme les gaz non conventionnels . On peut, on doit, compter les gaspillages et leurs méfaits dans les chiffres permettant de décider ce qu’il faut faire ou ne pas faire, mais dire aujourd’hui que nous supprimons les fossiles, que nous voulons brider le nucléaire, que nous voulons universaliser les éoliennes en mer tout en conduisant la France vers les succès est un leurre.

14 commentaires sur “Gaz de schiste : la fin des mensonges ?

  1. Investir dans la recherche, développer les énergies renouvelables adaptées à la situation géographique, intéresser les habitants aux revenus de ces énergies renouvelables pour une meilleure acceptation, continuer à améliorer les rendements des énergies fossiles sans les interdire, continuer l’exploitation du nucléaire, ne pas enfuir les déchets nucléaires sans possibilité de les réutiliser à l’avenir, favoriser les éléments chimiques recyclables à niveau égal d’utilisation (métaux, verre, etc…), ne plus confondre recycler et déchet valorisé car dans ce cas il faut puiser de nouveau dans le sol pour refabriquer, interdire les pubs sur l’énergie verte qui n’existe pas, éduquer la jeunesse sur les valeurs humanistes tel que le respect, sortir notre société du consumérisme et du narcissisme, dire la vérité sur l’électrification mobile avec des batteries très polluantes et catastrophiques écologiquement, expliquer la notion d’énergie intermittente, ne plus opposer une énergie et une autre, choisir le mix énergétique qui correspond à l’activité locale… et promouvoir la sobriété, respecter le vivant et nos anciens. Il y a du boulot cher Loïk !

  2. Merci. C’est un leurre, en effet,
    puissamment appuyé par nos médias, qui sont volontiers anti-nucléaires. Nos journalistes pêchent trop souvent par ignorance scientifique en matière de nucléaire, ignorance qui fragilise hélas la colonne vertébrale de toute l’industrie de l’électricité en France. Quelle incroyable propension de nos concitoyens à scier la branche sur laquelle ils sont si confortablement assis.
    Il faut plus de 2500 éoliennes pour obtenir l’électricité fournie par simple centrale nucléaire. Il n’y a pas toujours de vent ( ou de soleil pour le solaire) ,
    quand un réacteur nucléaire fonctionne jour et nuit, sans arrêt.

    La 4eme génération de réacteurs permettra de recycler nos déchets, c’est une mine d’or. Il faut reprendre Astrid. Nos seuls déchets retraités remplaceront en quantité d’énergie, l’équivalent des gazoducs allemands de type North Stream 1 et 2. Ces déchets nucléaires pour la 4eme génération représentent l’équivalent de milliers et des milliers de tonnes de pétrole, au meilleur prix pour le contribuable français. Nous avons actuellement de quoi ( combustible) alimenter la France pour 10 siècles. Il faut impérativement investir dans le nucléaire, qui n’émet pas de CO2.
    Gardons-nous des pénalités européennes qui souhaiterait affaiblir notre industrie électrique. Formons une nouvelle génération d’ingénieurs, de techniciens, au nucléaire d’aujourd’hui. Profitons de notre belle avance française en matière d’électricité nucléaire, ainsi que des technologies qui fonctionnent très bien dans d’autres pays (Etats-Unis, Chine), pour nous refaire une santé industrielle.

    1. Et voilà tous ces beaux argumentaires péremptoires qui tombent déjà à l’eau !
      Quelques jours de canicule qui privent de vent les éoliennes, privent de refroidissement des centrales nucléaires, mais abreuvent de soleil le photovoltaïque…. il n’y a pas donc pas encore de panacée !
      Arrêtons de dénigrer ceci ou cela, cherchons l’équilibre par la transition la plus souple en tirant des conclusions à partir de nos erreurs.
      Faisons-nous confiance pour trouver des réponses technologiques aux risques des batteries (batteries solides à venir?) réussite de la précision des fracturations de schistes sans dommages aux nappes phréatiques, récupération du CO2 pour en faire du carburant, etc… Tenez-vous au courant des évolutions qui sont encore plus rapides que vous ne l’imaginez !
      Gouverner c’est prévoir, dit-on? En cas d’urgence, peut-être qu’un un zeste de décroissance serait une forme d’intelligence du genre humain pour s’adapter au lieu de chercher à adapter la nature à notre mode de vie gaspilleur ? Non ?

      1. allez dire aux indiens, aux africains… »qu’un zeste de décroissance serait une forme d’intelligence », l’humanité ne connait depuis ses origines que la croissance , la science doit conduire à limiter les gaspillages. En apprenant de plus en plus ce qu’est la nature nous cherchons à en maitriser un maximum d’aspects, ce qui a conduit, entre autres, à augmenter la durée de vie moyenne.

  3. Bravo Loïc. Il faut dénoncer les mensonges autrement on n’en sortira jamais. La population a tellement été endoctrinée qu’elle continue de répéter que les énergies renouvelables sont bon marché. Hier encore un traider de Londres me le prétendait.

  4. Euh …. Je suis d’accord sur l’analyse mais on va quand même pas faire l’apologie de la fracturation hydraulique ? On en sait suffisamment aujourd’hui pour comprendre que les produits utilisés polluent les sols de manière durable. Où alors je fais une erreur d’interprétation de ce qui est écrit ?

    1. je ne fais pas l’apologie de la fracturation hydraulique, mais le gaz que vous consommez aujourd’hui dans votre cuisine contient du gaz de schiste ! Donc vous acceptez la fracturation hydraulique . Si c’est mauvais chez vous c’est mauvais chez les américains j’ai bien compris on est sur la même planète ou il y en a deux ?

  5. Bonjour M. Le Floch-Prigent,

    Vous me permettrez d’apporter un petit bémol à votre article. La production d’électricité par des centrales nucléaires ne nous a pas rendu indépendant. Après une période durant laquelle nous avons exploité des mines d’uranium sur notre territoire, nous importons aujourd’hui l’uranium nécessaire au fonctionnement de nos centrales. Les Allemands importent du gaz russe pour faire fonctionner leurs centrales électriques pendant que nous importons de l’uranium pour produire de l’électricité. A chaque pays ses dépendances.

    Cordialement.

    1. indépendant ne veut pas dire autarcique ! nous n’avons pas de problème de combustible nucléaire car nous en stockons, nous avons plusieurs fournisseurs et , demain, avec les réacteurs à neutrons rapides nous aurons avec les « déchets » des centaines d’années devant nous . L’allemagne en refusant les terminaux gaziers (GNL) en finançant des gazoducs à travers la Baltique s’est mise en relation de dépendance vis à vis de la Russie ! L’indépendance c’est choisir ses dépêndances, j’ai indiqué , en son temps , les dangers pour l’allemagne de se mettre en dépendance pour 60% de son gaz avec les russes! Par contre ils achetaient le pétrole et le charbon aussi aux russes, et maintenant ils peuvent l’acheter ailleurs . En ce qui concerne le gaz ils ont au moins cinq ans de galère

      1. Votre analyse est très pertinente mais vous prenait pour actée la notion de dépendance et dans un seul sens.

        Si demain les Allemands fabriquent des terminaux gazier pour accueillir des super-méthanier ils deviendrons dépendants des principaux exportateurs de gaz liquéfié car il faudra bien amortir ces investissements. Le bilan écologique du Gaz de schiste venant des USA par bateau est bien plus élevé que du gaz Russe amené par Gazoduc.
        Dans le cas de Nord Stream 2 ce n’est pas un accords de soumission mais un partenariat. Jusqu’à present la Russie n’a jamais posée de problème d’aprovisionnement, ni de hausse de tarif non négocié. La dépendance était douce et pour le benefice des consommateur allemands et des exploitants russe. Il faut rappeler que ce qui suscite ces interrogations est la mise en place de sanctions inutiles dont les coûts n’on pas été chiffrés. La Russie n’a pas attaqué l’UE sur le plan commercial. Ils voulaient punir la Russie car il la croyait dépendante, ils se punissent eux même !
        Il faut mettre en parallèle le mode de calcul des prix pour les hydrocarbures. Il n’y a pas de coût supplémentaire pour l’exploitation mais les prix se sont envolés quels sont donc les profiteurs de guerre et ceux qui payent ?

        La première dépendance n’est elle pas la soumission aux lois du marché sans régulation mondiale ?

        La politique dans l’instant où des décisions sont prisent comme on tweet en fonction du vent et la mise en avant de certitudes bien pensantes mais aucunement bien fondées est aussi la mère de decisions stupides que les citoyens paient en taxes et impôts.

        1. pour moi l’indépendance ne peut pas être l’autarcie et c’est donc de choisir ses dépendances! Dès qu’il y a un monopole sur un produit critique, il y a un problème d’indépendance et il faut rechercher les voies et moyens d’échapper. Se mettre à 60% de dépendance de la Russie pour le gaz, vouloir arrêter les centrales nucléaires et dépendre du charbon russe comme du pétrole russe à 50% était une erreur de l’Allemagne que j’ai dénoncé en son temps. C’est à chaque Etat souverain de trouver sa régulation qui doit toujours rester uu mix énergétique varié avec des fournisseurs nombreux.

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