Pour sauver l’industrie française, réduisons les impôts

Si on veut aider l’industrie aujourd’hui, il faut d’abord restaurer la compétitivité du pays par exemple en gommant les impôts de production.

Le 23 novembre 2021, en visite dans sa bonne ville d’Amiens, le président de la République a rencontré les derniers salariés de l’usine Whirpool qui n’ont pas pu retrouver du travail puisque les projets de reprise du site ont échoué : ainsi les bonnes intentions exprimées par le chef de l’État n’ont pas suffi, la reconversion industrielle comme la relocalisation ne dépendant pas de la volonté d’un homme. C’est plus compliqué que cela.

ÉCHEC DU SAUVETAGE DE L’INDUSTRIE À AMIENS

Avant de se précipiter au chevet d’une entreprise qui délocalise il est nécessaire de bien comprendre pourquoi depuis trente ans au moins les sites industriels disparaissent un à un vers d’autres pays ayant un environnement plus clément.

À force de faire des discours sur l’attractivité de la France on finit par y croire et ne plus voir la réalité : quelle qu’elle soit, la production industrielle française est plus chère que dans tous les autres pays, même en Europe, en Allemagne ou en Suisse : la rentabilité structurelle du pays est plombée par son environnement fiscal, normatif, règlementaire et administratif.

Ceux qui peuvent encore rester en France sont de deux catégories :

  1. Les sociétés internationales qui installent à l’étranger une partie plus ou moins importante de leur production.
  2. Les propriétaires d’entreprises de « niches » basées sur l’innovation, la qualité ou la proximité.

En trente ans l’industrie française a décru de moitié. Sommes-nous arrivés au socle ? Hélas non, chaque semaine nous observons des disparitions, des départs de pépites ou des ventes d’activités à des capitaux étrangers qui pourront valoriser le savoir-faire français dans des pays plus attractifs.

Le problème d’un chef d’État c’est d’essayer de comprendre les causes d’un sinistre et d’y remédier pour en éviter d’autres, ce n’est pas de veiller au reclassement des employés. Son impuissance à satisfaire les salariés de Whirpool est avant tout celle de ne pas avoir pu réunir les conditions de compétitivité de cette entreprise pour lui permettre de rester à Amiens. Ce sont ces raisons qui doivent donc être sur sa feuille de route. S’il souhaite que la France soit de nouveau un pays industriel comme dans les années 1970, il faut agir sur les causes et non pas pleurer sur les effets.

L’industrie se développe avec des entrepreneurs attachés à leurs produits et à leur personnel. Ils savent ce qu’il faut faire pour réussir et ont besoin avant tout de rester compétitifs.

SUPPRIMER LES IMPÔTS DE PRODUCTION POUR AIDER L’INDUSTRIE

Pour cela, il faut d’abord restaurer la compétitivité du pays :

  • Supprimer les 70 milliards d’impôts de production qui à ce niveau n’existent qu’en France.
  • Revenir à un prix de l’énergie électrique correspondant aux investissements nationaux dans le nucléaire et l’hydraulique.
  • Rétablir la fluidité du crédit impôt recherche et innovation.
  • Ne pas aller au-delà des directives européennes concernant l’environnement en  ajoutant des contraintes nationales supplémentaires…

Et bien d’autres choses encore.

À titre d’exemple nous produisons notre énergie électrique d’origine nucléaire autour de 32 euros le MWh, nous la vendons à nos concurrents à 42 euros, et les industriels français la rachètent au marché artificiel inventé par la Commission européenne entre 120 et jusqu’à 240 euros le MWh.

Donc si l’État veut être efficace pour son industrie, la première chose à faire est de diminuer les prélèvements divers et supprimer les mesures qui l’affaiblissent par rapport à la concurrence.

À cet égard, quelle que soit la bonne volonté des uns et des autres, continuer à faire payer des impôts injustes aux entreprises et communiquer pour expliquer que 30 milliards sur cinq ans seront restitués à certaines d’entre elles parait absurde même si cela semble plaire aux commentateurs.

Peu importe le talent des bureaucrates, ils ne sont pas les mieux placés pour demander des dossiers, les étudier, en juger et contrôler les programmes de travail. L’efficacité de l’argent public dans le secteur de l’industrie est clairement de remettre d’abord les entreprises en état de compétitivité. Elles n’auront ainsi pas besoin de subventions ou d’aides.

Le pouvoir politique préfère choisir de prendre de l’argent aux entreprises et d’en restituer une partie à seulement quelques-unes d’entre elles. Il montre ainsi aux électeurs qu’il est utile, mais cette pratique assez habituelle devrait être précédée d’une efficace modération des prélèvements.

Il n’est pas sûr que le public, les électeurs, le comprennent. Les salariés des entreprises continueront à se plaindre des échecs et des abandons, les parlementaires défileront avec eux pour exprimer leur colère et les présidents de la République successifs regretteront leur impuissance !

Mais les faits sont têtus, résister à la concurrence suppose de bénéficier de conditions au moins semblables à celles de nos voisins, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui en France. La plupart du temps cela conduit à la disparition et au déménagement. Il faut retrouver le chemin de la raison.

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1 commentaire sur “Pour sauver l’industrie française, réduisons les impôts

  1. Depuis mars 2020 et le début de la crise du coronavirus, l’État a joué le rôle d’assureur en dernier ressort de l’ensemble de l’économie marchande. C’est un fait indiscutable.
    Les pouvoirs publics ont ainsi ventilé aux entreprises pas moins de 240milliards d’euros directement. Chiffre auquel il faut ajouter près de 300milliards d’euros de prêts garantis et un montant de près de 200milliards d’euros pris en charge par les assurances sociales et l’Unédic au titre du chômage partiel.
    Cette masse considérable a été attribuée au nom de l’emploi, mais n’a fait l’objet d’aucune conditionnalité…
    Début 2021, les chiffres des marges des entreprises, autrement dit, de ce qu’il leur reste une fois leurs coûts fixes payés, étaient sans équivoque: elles atteignaient 35,7% au deuxième trimestre 2021 selon l’Insee, puis sont retombées à 32,9%, un niveau néanmoins encore bien supérieur au niveau moyen de 2018 (31,6%).
    L’intégralité des 40 groupes qui font partie de l’indice phare de la Bourse de Paris a été soutenue par des fonds publics. Et, en parallèle, les dividendes versés par ces 40 groupes ont progressé de 3 milliards d’euros tandis que 6 milliards d’euros ont été réservés à des programmes de rachats d’actions. Les bénéfices globaux ont progressé de plus de 30% au premier semestre 2021 par rapport à celui de 2019 et sept des douze groupes les plus bénéficiaires du CAC ont supprimé des emplois en 2020.
    Gérald Darmanin, alors ministre des comptes publics, assurait en 2019 que le soutien public aux entreprises privées s’élevait à 150milliards d’euros, un chiffre qui, alors, dépassait deux fois le déficit public.
    L’évaluation même de ces aides est un des mystères les mieux gardés de la République. Il n’existe aucun cadre officiel concernant l’examen de la loi de finances pour les connaître et les évaluer.
    Depuis 1996, les dépenses de Sécurité sociale font l’objet d’une loi de financement séparée et scrutée par le Parlement avec pour fonction de les contrôler et les réduire. On a même contraint la Sécu à amortir sa dette, sans vraie justification financière puisque cette méthode est très coûteuse (environ 16 milliards d’euros par an) alors que les taux réels ont toujours été très bas.
    Christine Pirès-Beaune, rédactrice d’un rapport sur le Crédit d’impôt recherche (CIR), souligne ainsi qu’il lui est encore impossible, par exemple, de connaître les entreprises qui bénéficient le plus de ce dispositif.
    Il s’agit d’un enjeu de transparence majeur et résister contre cette forme d’unanimité béate sur le soutien public durant la pandémie sans s’interroger sur la nature de ce soutien. Très longtemps, dans l’urgence de la pandémie et face au risque d’effondrement économique, la logique «d’arrosage» des entreprises a prévalu, vision largement alimentée par l’idée que cette politique pouvait revaloriser le soutien public à l’économie et que, dès lors, «tout le monde était devenu keynésien» .
    Ces aides profitent-elles à la Nation? Sur le plan strictement macro-économique, rien n’est moins sûr. Les évaluations du CIR et du CICE (devenu baisse de cotisation pour 20 milliards d’euros) ont montré des effets relativement faibles sur l’économie française et en tout cas sur l’investissement productif et la recherche…
    La crise du coronavirus ouvre une nouvelle phase où l’État est désormais une forme d’assureur en dernier ressort de l’existence des entreprises. Le formidable soutien public, au nom de l’emploi, de l’outil productif pourrait agir comme un précédent. À chaque ralentissement, à chaque crise, l’État viendra se substituer à l’économie marchande pour éviter faillites et baisses de rentabilité.
    Autrement dit, la pratique du soutien public au privé est désormais, dans les faits, élargie à d’autres risques qu’aux fermetures décidées directement par l’État (et qui pourraient justifier une compensation directe), et notamment à des risques économiques (baisses de la demande liée au passe sanitaire ou problème de chaînes logistiques). La mise en place de l’activité partielle de longue durée (APLD), dispositif pérenne de chômage partiel (favorisant par ailleurs des accords d’entreprise de compétitivité), avait montré la voie.
    Dès lors, la question de la destination des aides publiques ne peut être distinguée de celle de cette évolution de la menace d’un glissement d’un «Welfare State», assurant les citoyens contre les aléas de la vie, à un «Corporate Welfare», garantissant les bénéfices des entreprises. l’État assurant l’emploi en assurant les entreprises, c’est la confusion assumée sur la fonction sociale de l’entreprise d’un monde marchand en pleine mutation.

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