Guerre du Kippour en 1973, 1er choc pétrolier. Quid d’octobre 2023 ?

Atlantico : Le premier choc pétrolier remonte à 1973. Il résulte d’une diminution nette de la production de pétrole par les pays exportateurs, survenue dans un contexte de guerre au Kippour. Compte tenu de ce que l’on sait de ce précédent épisode de notre histoire, faut-il craindre un nouveau choc pétrolier en octobre 2023, selon vous ?

Le contexte est, bien entendu, très différent ! Il s’agissait, en 1973, d’assécher les pays consommateurs de pétrole avec la volonté d’augmenter les prix et de montrer ainsi la puissance des pays producteurs . Aujourd’hui l’amicale des pays producteurs veut maintenir des prix élevés pour garder un rendement suffisant de leurs richesses pétrolières et gazières , mais il n’y a pas le souhait exprimé de préparer les pays consommateurs à une pénurie .

Toutefois à chaque fois qu’il y a une agitation forte au Moyen-Orient , il y a toujours une crainte de connaître des restrictions et donc une anticipation à la hausse du prix du baril qui conduit effectivement invariablement à une hausse ! Il faut donc s’attendre, après une baisse de la production orchestrée par la Russie et l’Arabie Saoudite, à un prix élevé du baril dans les prochaines semaines tant que la situation au Moyen-Orient sera incertaine .

Les contextes, entre 1973 et 2023, ne sont pas exactement les mêmes. Dans quelle mesure ces différences pourraient-elles se ressentir ? Peut-on prévoir, par exemple, la différence d’ampleur qui pourrait exister entre ces deux chocs ?

Pour l’instant il n’y a pas volonté de « choc » de la part des producteurs , il n’y a que la volonté de garantir leurs intérêts dans une période d’incertitude , mais leur perméabilité à satisfaire leurs opinions publiques peut changer la donne, tout dépend de ce qui va se passer maintenant !

L’horreur des attaques du Hamas peut déclencher des réactions de la part d’Israël qui peuvent conduire à un embrasement de la rue dans les pays arabes , et on changerait alors de contexte .

Nous sommes aujourd’hui dans un contexte essentiellement économique , il peut en être autrement demain , et le monde pétrolier retient son souffle . Nous devons retenir que l’énergie consommée dans le monde est à 85% du charbon, du gaz et du pétrole et que très peu de pays peuvent imaginer dans un délai court de se passer des énergies fossiles comme on a pu l’observer ces deux dernières années avec la dépendance considérable de l’Allemagne au gaz russe …et à son pétrole .

Les pays qui ont retardé ou annulé leurs investissements dans l’énergie nucléaire risquent de le regretter !

A certains égards, le choc attendu en 2023 apparaît être un choc d’anticipation, en réponse à l’incertitude. Cependant, il faut aussi rappeler que le contexte est particulier : des tensions sur la production de pétrole prédataient clairement les premiers assauts du Hamas, lancés le 7 octobre sur Israël. Dès septembre, l’Arabie Saoudite réduisait sa production. Comment faut-il l’interpréter ? 

Il est difficile de rapprocher les deux événements, Israël se rapprochait de l’Arabie Saoudite , tandis que pour des raisons financières la Russie et l’Arabie Saoudite s’alliaient pour garder une certaine hauteur au prix du baril . Ce sont les « accords d’Abraham » qui ont peut-être déclenché cette réaction du Hamas pour susciter une prise de conscience des pays arabes, mais il n’y avait pas de volonté des pays arabes pétroliers de préparer cette action. Il s’agissait simplement de prévenir les pays consommateurs que malgré leurs rodomontades anti-fossiles ils étaient toujours très dépendants et pour bien des années encore des énergies fossiles ! Entre la volonté affichée d’en sortir et la réalité , il y a un fossé , et les pays producteurs l’ont fait remarquer et ce n’est pas fini ! Nous sommes les seuls à nous bercer d’illusions sur l’efficacité des énergies intermittentes pour nous assurer une prospérité .

De telles tensions préexistantes peuvent-elles aggraver le choc ?

Ce sont les actions à venir qui peuvent aggraver le choc et personne ne les connaît . Nous savons simplement que les opinions publiques occidentales sont perméables à l’horreur de l’action du Hamas , et que ce n’est pas le cas dans un grand nombre de pays producteurs de pétrole !

Quelle attitude avoir, en tant qu’Etat par exemple, pour se préserver autant que faire se peut des effets du choc pétrolier ?

Nous revenons à notre action en 1973 , une accélération des programmes nucléaires, un renforcement des programmes hydroélectriques, le recours aux fossiles de proximité. En 1973 nous avions investi lourdement en Mer du nord dans le gaz, dans le pétrole et avons eu des performances remarquables dans tous les pays en dehors du Moyen-Orient . Il suffit de reprendre les données de base de la souveraineté et de l’indépendance . La France dispose de « gaz de schiste » , nous ne voulons pas l’exploiter, mais nous allons avoir besoin de gaz pour passer les pics de consommation électrique. A nous de savoir si nous voulons rester dans l’idéologie ou si nous redevenons pragmatiques pour préserver la prospérité de nos populations . Nous avons besoin de l’abondance énergétique et nous pouvons rapidement la rebâtir. Retrouvons une volonté politique de ne pas céder aux apôtres de la décroissance .

Nous devons être solidaires des peuples qui n’acceptent pas les horreurs du Hamas, cela aura un coût, et nous avons les moyens d’atténuer ce cout pour notre population.

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